|
| Eclusier ? Un sacré métier! Il y a quelques mois
la seule écluse de Wallonie qui n' était pas du tout automatisée : celle d'Hastière, près
de Dinant a disparu… et avec elle la pratique
d'un métier très ardu, souvent méconnu : celui d'éclusier. Quand j'arrive à Hastière, en début d'après-midi, les hommes sont sur le barrage, en amont de l'écluse. Lorsque l'on employait le terme "barrage", je croyais naïvement qu'il s'agissait d'un grand mur, avec un lac derrière… ou de ce que les enfants, heureux d'avoir placé quelques gros cailloux dans la rivière, appellent pompeusement "barrage" ! Et bien non. Il s'agit en fait d'une construction barrant toute la rivière ou le fleuve (la Meuse dans ce cas), ayant pour buts de réguler le débit de l'eau et d'empêcher des éléments encombrants de poursuivre leur voyage au fil de l'eau (troncs d'arbres, déchets divers...). Le responsable de l'écluse m'explique que le barrage est couché et que les hommes sont en train de le relever. Ils placent les "aiguilles", c'est-à-dire des morceaux de bois de 3 mètres de long qui, glissés les uns contre les autres dans une sorte de gouttière, filtrent l'eau et ralentissent le débit sur la moitié de la largeur de la Meuse. L'autre moitié est quant à elle barrée par des éléments en bois, fixés dans le lit de la rivière, et que l'on peut coucher ou lever suivant les nécessités. Sur le côté, un canal permet le passage des bateaux. Par cette glaciale et humide journée d'hiver, le travail est particulièrement pénible. Les hommes sont au travail depuis 9 heures du matin. Jusqu'à 16 h, ils n'arrêteront guère. Travail très physique, mais aussi délicat : il faut en effet une certaine habitude pour ne pas faire de fausse manœuvre. De plus, la passerelle sur laquelle ils se déplacent est étroite et glissante. Ils doivent d'ailleurs rester attachés au filin de sécurité, ce qui n'est guère aisé pour transporter les aiguilles et se mouvoir souplement. Leur regret, bien qu'ils ne soient nullement contre le progrès : les nouvelles écluses entièrement automatisées - telle celle en construction en aval - vont entraîner une profonde mutation de ce boulot qu'ils aiment. Car être éclusier, c'est presqu'une vocation pour certains… ou une affaire de famille, le fils succédant au père qui a lui-même succédé au grand-père. Et puis, il y a tous les souvenirs, les petits moments de joie qui font sourire. Et aussi cette espèce d'"initiation" qui fait que tout visiteur est jugé sur son aptitude à traverser le fleuve sur la passerelle. La tête remplie d'anecdotes drôles
ou dramatiques, les yeux reflétant "leur" fleuve, ces hommes de l'eau
parlent de leur dur métier avec une passion débordante… Catherine BOUVY |
Envoyez un courrier électronique à
Webmaster@les-gaux.be pour toute question ou remarque concernant ce site
Web. |